La stérilisation précoce
Objet de nombreuses réticences en France, la stérilisation précoce (stérilisation des chatons âgés de moins de 4 mois) est depuis une quinzaine d’années, une pratique courante en Amérique du Nord.
Quelles sont les incidences sur la santé du chat ?
Toutes les études menées, ainsi que le recul dont nous disposons actuellement, n’ont pas permis de mettre en évidence des incidences sur la santé et le développement du chat.
Les études ont menées sur la comparaison et le suivi de 3 groupes de chats (mâles et femelles) :
- Chatons stérilisés à 7 semaines
- Chats stérilisés après leur puberté (7 mois)
- Chats adultes entiers
Les constatations sont les suivantes :
- Aucune incidence sur le diamètre de l’urètre des chats mâles stérilisés à 7 semaines
- Aucun retard de croissance
Concernant la croissance, il est en effet important de noter que la puberté entraîne le processus de ralentissement puis de l’arrêt, de la croissance des cartilages. En stérilisant un chaton avant sa puberté, on freine ce processus. La croissance osseuse se poursuit donc plus longuement, le chat stérilisé précocement aura donc une taille légèrement supérieure à celle d’un congénère entier ou stérilisé plus tardivement.
Chez les mâles stérilisés avant 10 semaines, on constate qu’il n’y a pas de séparation entre le pénis et l’étui pelvien. Cela ne gêne aucunement le chaton dans sa fonction urinaire et n’a pas d’incidence sur sa santé.
Il a également été observé que la prise de poids qui découle fréquemment des suites d’une stérilisation effectuée après la puberté, est rare chez le chat stérilisé précocement.
Il n’a pas été constaté en effet de perte de la vitalité et de la dépense énergétique chez le chaton après sa stérilisation, comme cela est le cas chez le chat stérilisé après sa puberté. La prise de poids est donc très limitée.
Ni les études européennes, ni les études américaines, n’ont pu mettre en évidence la moindre incidence dommageable pour la santé et le développement du chat stérilisé précocement. La stérilisation précoce n’est donc aucunement dangereuse pour la santé du chat.
L’anesthesie
Les risques liés à l’anesthésie sont rigoureusement identiques à ceux auxquels sont exposés les chats adultes. Un chaton de 3 mois qui ferait une réaction à une anesthésie, ferait probablement la même réaction à l’âge de 8 ou 12 mois.
Il a été constaté une récupération très rapide à l’anesthésie, des chatons stérilisés entre 10 et 14 semaines. Tout particulièrement par comparaison avec des chats plus âgés. Le chaton a un réveil très facile et récupère rapidement toute sa vitalité. 2 à 3 heures après son réveil, il joue normalement.
Nous rappelons à ce sujet, concernant les chatons sphynx, qu’il faut veiller au problème d’hypothermie, le chaton doit impérativement être déposé au réveil sur un tapis chauffant. Certains vétérinaires opèrent également sur tapis chauffant.
La kétamine ne doit surtout pas être utilisée pour l’anesthésie d’un sphynx, elle est toxique.
A quel age pratiquer une stérilisation précoce ?
Il est possible de stériliser un chaton à partir de 7 semaines. Toutefois, pour éviter de recourir à un protocole pédiatrique pour l’anesthésie, plus délicat, nous conseillerons d’attendre que le chaton ait atteint un poids d’un kilo. Soit entre 10 et 14 semaines. L’avantage d’attendre un peu pour un éleveur est de ne pas stériliser un chaton qui va évoluer très favorablement en type. Il est en effet difficile de juger du type d’un chaton de 7 à 8 semaines…
La technique chirurgicale est exactement la même que sur un chat plus âgé. Il n’y a pas plus de difficultés à stériliser une femelle qu’un mâle. Les vétérinaires qui ont stérilisé des chatonnes de 3 mois, constatent également l’absence de dépôts graisseux sur les ovaires, ce qui facilite l’intervention.
Pourquoi stériliser précocement un chaton ?
Cette pratique est intéressante pour les éleveurs souhaitant écarter du circuit de la reproduction certains chatons de leurs portées et les particuliers désirant acquérir un chaton de compagnie.
Pour l’éleveur, c’est l’assurance que le chaton vendu en compagnie ne reproduira jamais.
Certains chatons ont en effet un type assez moyen, voire, peuvent être porteurs de défauts morphologiques disqualifiants en expo (nœud à la queue par ex), il n’est donc pas souhaitable qu’ils reproduisent.
Or, en vendant un chaton en compagnie, on n’est jamais certain que l’acquéreur ne changera pas d’avis un jour en décidant de le faire reproduire. Il n’est pas rare par exemple que les proches fassent pression pour que le nouveau propriétaire fasse au moins une portée.
Quoi de plus angoissant pour un éleveur de découvrir que la chatonne vendue pour la compagnie, est gestante, et entre les mains de quelqu’un qui n’a pas la connaissance des gestes à accomplir en cas de difficultés qui se présenteraient lors de la mise bas ? Et l’élevage du chaton sphynx n’est pas toujours simple à gérer, principalement au niveau du sevrage.
Certaines personnes n’hésitent pas à demander un chaton de compagnie (vendu moins cher), mais avec déjà la ferme intention de débuter un élevage. Et ne parlons pas de ceux qui achètent un chat de qualité compagnie, et le revendent comme de qualité expo, 2 fois plus cher, à des naïfs. En annonçant que le chaton vendu en compagnie sera stérilisé, on fait fuir les acquéreurs douteux. Il vaut mieux rater une vente que de céder un chaton à quelqu’un qui n’est pas sincère et qui trahit la relation de confiance nécessaire entre l’éleveur et l’acquéreur.
Certains acquéreurs voient dans la reproduction, un moyen de se rembourser du prix du chaton (bien que le risque soit surtout, de ne pas rentrer dans ses frais…). Se rembourse-t-on du prix de son lecteur DVD en organisant des séances payantes de visionnage de films chez soi ?
Tout éleveur sérieux doit prendre en compte que le sphynx ne possède pas un pool génétique aussi élevé que certaines races, comme le persan, le siamois…
Il doit donc veiller à ne pas laisser entrer dans le circuit de la reproduction, trop de chats issus des mêmes reproducteurs, principalement si le type de ces chats n’est pas de nature à participer à l’amélioration de la race et veiller à ne céder pour élevage ses chatons, qu’à des éleveurs, novices ou expérimentés, possédant un véritable plan d’élevage qui contribueront à améliorer la race, et à éradiquer les tares génétiques.
La stérilisation précoce permet donc de protéger à la fois le chaton vendu en compagnie et le travail de l’éleveur (et celui des éleveurs qui l’ont précédé), dans l’intérêt de la race.
Pour le particulier, l’avantage est de ne plus avoir à se préoccuper de la stérilisation de son sphynx, évitant ainsi les premières chaleurs d’une femelle (on limite le risque de tumeurs mammaires et utérines en stérilisant une femelle avant ses premières chaleurs), et les premiers marquages urinaires des jeunes mâles.
Quant aux risques de l’anesthésie, ils sont supportés par l’éleveur, non par l’acquéreur.
Rappelons qu’un éleveur ne vend pas un objet, mais un chaton qu’il a aidé à naître, qu’il a vu grandir, évoluer et auquel il est attaché. Il est donc légitime que ce soit lui qui décide si oui ou non ses chatons reproduiront. Il ne doit pas se laisser influencer par certains arguments qui veulent que ce soit à l’acquéreur qui achète un chaton, de faire ce qu’il veut avec.
Cet argument serait valable avec une voiture, pas lorsqu’il d’agit d’un être vivant.
Nous rappelons également que sur les contrats de vente, la clause qui consiste à retenir le pedigree contre une stérilisation effectuée par l’acquéreur après la vente, est considérée comme abusive et sans valeur juridique.
Bibliographie / références
- Etude menée par le Professeur Verstegen de l’université de Liège sur la stérilisation précoce du chaton, présentée au séminaire 2002 de la Société Française de Félinotechnie (SFF) qui s’est tenu à l’Ecole Vétérinaire de Maison Alfort
- Une étude très complète sur le site de la Winn Feline Foundation
- Dépêche Vétérinaire n° 672 2001 22 Chanoit G.
- Article du Dr Elise Malandain anciennement attachée à l’Unité de Médecine de l’Elevage et du Sport (UMES) l’Ecole Vétérinaire de Maison Alfort, dans le bulletin n°33 du Club Félinotechtnique Royal Canin – mai juin juillet 2003.