La cardiopathie hypertrophique (C.M.H.)
Nous tenons à adresser nos remerciements les plus respectueux au Professeur Valérie Chetboul, (Agrégé de Pathologie Médicale – Diplomate ECVIM-CA, Cardiology Unité de Cardiologie de l’Ecole Vétérinaire d’Alfort, UP de médecine pour l’aide précieuse qu’elle nous a apportée en ayant bien voulu relire et corriger ce dossier, ainsi que pour la documentation fournie.
Ce dossier très détaillé, que nous vous recommandons vivement de lire en intégralité et avec attention, va vous aider à mieux comprendre ce qu’est cette maladie, comment elle fonctionne, quels sont ses effets, comment la faire dépister et quels sont les traitements préconisés.
Cette maladie cardiaque affecte particulièrement le maine coon, le persan (et type persan) et le chat de gouttière (source AJVR, Vol. 65 N° 5, May 2004).
Toutefois, le sphynx n’en est pas exempt, et un certain nombre de cas de CMH ont été détectés chez des reproducteurs, dans le monde entier, suffisamment pour que les éleveurs de sphynx prennent conscience du risque que représente cette maladie pour la race, et commencent à s’en préoccuper avant qu’elle ne prenne des proportions alarmantes.
Les estimations récentes, obtenues grâce à la transparence des éleveurs, particulièrement des éleveurs américains, très ouverts sur ce sujet, font état d’une estimation de 10 à 15 % environ, de sphynx touchés par la cardiomyopathie hypertrophique.
Le dépistage de la CMH devient donc une étape indispensable pour tout éleveur de sphynx.
NOUS ENCOURAGEONS VIVEMENT LES ELEVEURS À COLLABORER AU PROGRAMME DE DEPISTAGE, DANS L’INTERET MEME DE LA RACE.
Nous nous tenons à votre disposition, pour toute question que vous vous poseriez
et pour vous guider dans votre démarche de dépistage.
La cardiomyopathie hypertrophique est une maladie incurable, à évolution plus ou moins rapide. Un chat atteint peut cependant vivre de nombreuses années, à condition d’être correctement suivi et sous traitement. Il n’est pas possible actuellement de déterminer l’espérance de vie d’un chat CMH. Chez le maine coon, la maladie est souvent dépistée chez de jeunes sujets (parfois moins d’un an), et l’évolution est très rapide.
Chez le sphynx, elle est plus fréquemment dépistée suite à l’apparition tardive d’un souffle cardiaque (vers 3, 4 ou 5 ans), mais on note des cas de sphynx positifs CMH, âgés de plus de 10 ans et demeurant en très bonne condition physique, grâce à un traitement adapté et à un dépistage précoce.
La CMH doit être considérée comme une maladie génétique. Elle est la conséquence de la survenue d’anomalies sur les chromosomes responsables de la fabrication des différentes protéines constituant le muscle cardiaque. Elle est transmise par les géniteurs dans 70% des cas.
En l’état actuel des recherches, le gène responsable de la maladie chez le maine coon a été identifié comme étant d’allèle dominant à pénétration incomplète. Il existe actuellement une forte suspicion pour qu’il en soit de même chez le sphynx.
« Dominant » signifie textuellement, qu’un seul porteur du gène déclenchant la maladie est nécessaire pour la transmission à une partie de la portée (un gène d’allèle récessif doit lui, être porté par les deux parents pour être transmis à la descendance).
« Pénétration incomplète » signifie qu’un chat peut être porteur de l’anomalie génétique responsable de la CMH, mais sans lui-même développer la maladie. Par contre, il transmettra ce gène à ses chatons, qui eux, pourront développer une cardiomyopathie hypertrophique. C’est pour cette raison que l’on peut constater un développement de la maladie, sur des chats issus de parents déclarés indemnes au dépistage.
A l’heure actuelle, il n’existe pas encore de test génétique permettant un dépistage précoce avant que la maladie ne se déclare et permettant de dépister les « porteurs sains ».
Afin de déterminer le mode de transmission, chez le sphynx, le Sphynx Club a entamé des démarches auprès de Maison Alfort, dans le cadre d’une consultation génétique. Nous vous tiendrons informés et le concours des éleveurs sera très important.
Autres noms de la maladie: Cardiomyopathie hypertrophique, primitive ou idiopathique ; Myocardiopathie hypertrophique ; Cardiomyopathie obstructive ; Sténose sous aortique.
De Quelle manière la C.M.H. affecte le coeur ?
Pour mieux comprendre cette maladie, il vaut la peine de se familiariser avec la structure et la fonction normale du coeur.
Structure du coeur
La 1ère figure schématise en coupe un cœur normal composé de 4 cavités (deux oreillettes et deux ventricules) séparées par 2 valves (mitrale et tricuspide).
Le sang arrive dans les oreillettes par les veines (veines caves dans l’oreillette droite, veines pulmonaires dans l’oreillette gauche). Les veines pulmonaires sont de petite taille
Il quitte les ventricules par deux grosses artères (aorte et artère pulmonaire) après avoir franchi deux valves (respectivement la valve aortique et la valve pulmonaire).
Les parois du cœur sont composées d’un muscle spécialisé que l’on nomme myocarde. C’est cette partie du coeur qui est affectée dans le cadre d’une CMH.
Fonctions du coeur
Le flux sanguin circule dans le cœur de la manière suivante :
- Le sang qui a libéré son oxygène dans les tissus remonte vers le cœur par le système veineux – veines caves – et se jette dans l’oreillette droite.
- Il se déverse dans le ventricule droit en passant par la valve tricuspide, puis est éjecté lors de la contraction du ventricule droit dans l’artère pulmonaire à travers la valve du même nom.
- Une fois oxygéné dans les poumons, le sang revient dans l’oreillette gauche par les veines pulmonaires.
- Après avoir traversé la valve mitrale, il remplit le ventricule gauche qui va l’éjecter dans l’aorte à travers la valve aortique pour aller irriguer les tissus. Commence alors un nouveau cycle.
Chaque battement de coeur est généré par un signal électrique.
Ainsi que l’illustre la figure ci-contre, le signal démarre au sommet du coeur et se propage vers la pointe en le traversant entièrement (les flèches bleues montrent le sens de propagation du signal électrique).
Les anomalies du muscle cardiaque rencontrées lors de Cardiomyopathie (Obstructive ou non obstructive) peuvent parfois s’accompagner d’une altération de la propagation du signal électrique.
Cardiomyopathie Hypertrophique
La Cardiomyopathie Hypertrophique est caractérisée par un épaississement plus ou moins important du muscle cardiaque, appelé hypertrophie. La distribution de cet épaississement est variable d’un chat à l’autre. Cette hypertrophie touche principalement le ventricule gauche et dans une moindre mesure le ventricule droit.
Plusieurs types d’Hypertrophie
Dans la plupart des cas, l’hypertrophie ne touche qu’une portion du muscle, et tout particulièrement le septum interventriculaire qui est la paroi musculaire séparant le ventricule gauche du ventricule droit. Cette forme de CMH est appelée « Hypertrophie Septale Asymétrique« . (cf. figure ci-contre).
Dans de rare cas (2 % des cas), l’épaississement musculaire se répartie régulièrement tout autour du ventricule. On parle alors d’ « Hypertrophie Ventriculaire Symétrique« .
Enfin, l’épaississement du myocarde peut également être localisé à la pointe du cœur ou apex dans près de 2% des cas. On parle alors de « forme apicale ».
Les formes obstructives
Dans près de 20-25% des cas, cette hypertrophie est associée à une gêne à l’éjection du sang dans l’aorte. On parle alors de « Cardiomyopathie Hypertrophique Obstructive ».
Le principe en est le suivant. Au moment où le ventricule gauche éjecte le sang vers l’aorte, la valve mitrale est aspirée dans le flux et projetée contre le septum épaissi. Elle contribue ainsi à rétrécir la portion de ventricule que le sang doit franchir avant d’être éjecté dans l’aorte, réalisant ainsi une obstruction à l’éjection. Cette obstruction, qui peut être plus ou moins sévère, oblige le ventricule gauche à fournir un effort supplémentaire pour chasser le volume de sang nécessaire au besoin de l’organisme.
Ce rétrécissement est responsable de turbulences causées par l’accélération du sang à travers cet obstacle. Ces turbulences sont à l’origine du « souffle cardiaque » particulier (souffle systolique basal gauche), qui peut être détecté par le stéthoscope.
Enfin, le déplacement anormal de la valve mitrale s’accompagne souvent d’une perte d’étanchéité de cette structure. Une quantité plus ou moins importante de sang va alors refluer dans l’oreillette gauche en direction des poumons. On parle alors de « régurgitation mitrale », qui elle aussi peut être détectée à l’auscultation cardiaque (souffle systolique apexien gauche).
Les effets sur le muscle cardiaque
Le muscle hypertrophié se contracte le plus souvent normalement, voire avec excès. Par contre, il a de la peine à se remplir car il est trop rigide et se relâche mal après la contraction. Dans un premier temps, les conséquences de ce mauvais remplissage n’apparaissent le plus souvent pas au repos ou pour des efforts simples.
Par contre, lors d’efforts importants, le cœur ne pourra pas augmenter la quantité de sang nécessaire à l’activité musculaire car sa cavité n’accepte qu’une quantité fixe de sang.
Si le défaut de remplissage est trop important, le sang stagne dans les vaisseaux pulmonaires et fait augmenter la pression dans les tissus. Si la pression est trop élevée, l’eau envahit les poumons. On parle alors d’œdème pulmonaire.
Le muscle est également trop épais pour le nombre de vaisseaux coronaires. De plus, les petites artères ne peuvent pas se dilater lors d’efforts ainsi qu’elles devraient le faire.
Les fibres musculaires
Au microscope, le coeur atteint de CMH présente les caractéristiques suivantes. Les fibres ne sont pas alignées en parallèle mais de manière chaotique. On parle de désorganisation cellulaire (« myocardial disarray »)
Ci-contre, ces images illustrent la désorganisation chaotique des fibres musculaires cardiaques (qui sont obliques voire perpendiculaires les unes par rapport aux autres, et non orientées parallèlement comme dans un muscle sain).
A et B sont des images du septum interventriculaire du même chat et C montre la paroi ventriculaire droite d’un autre animal atteint de myocardiopathie hypertrophique.
A : Coloration à l’hématoxyline et éosine, et B, C : Coloration trichromique de Masson (collagène en bleu, fibres musculaires en rouge). Agrandissement x 40
De plus, le tissu amorphe situé entre les fibres contractiles prolifère, augmentant progressivement la rigidité du muscle. On parle alors de « fibrose interstitielle » (bien visible sur les 3 images A à C).
(Source : Journal of Veterinary Cardiology Vol. 5, N°2, November 2003 – Hypertrophic cardiomyopathy – Clinical and pathologic correlate – Philip R. Fox
Une dégénérescence des valves atrio-ventriculaires (valve mitrale notamment) est fréquemment associée, de même que des lésions dégénératives des artères coronaires contribuant ainsi à l’hypoxie myocardique.
Ci après schéma comparatif entre un cœur normal et un cœur touché par la CMH (Source : Medical encyclopedia, ADAM.Inc – H. Jacqueline Suk, MD – Boston):
Ci après, photos de coupes de cœurs touchés par la CMH. Notez l’épaississement impressionnant du myocarde, qui donne un aperçu des conséquences sur le remplissage.
(Source : Journal of Veterinary Cardiology Vol. 5, N°2, November 2003 – Hypertrophic cardiomyopathy – Clinical and pathologic correlate – Philip R. Fox)
Les symptômes de la C.M.H.
Les symptômes classiques de la CMH sont, par ordre d’importance :
- Essoufflement à l’effort, difficulté respiratoire (dyspnée), fatigabilité
- Anomalie auscultatoire : Souffle au cœur, bruit de galop, arythmie
- Abattement, toux
- Vertiges, pertes d’équilibre ou même de connaissance (syncopes)
Aucun de ces symptômes n’est spécifique de la CMH et peuvent se rencontrer avec d’autres maladies cardiaques.
Ces symptômes apparaissent le plus souvent lorsque le chat est âgéde 5 ans. Certains chats peuvent toutefois avoir des symptômes plus précoces.
Beaucoup de chats sont peu ou modérément gênés par cette maladie. Mais sans traitement, l’évolution est rapide et mène à la mort du chat.
Le despitage de la C.M.H.
Le diagnostic n’est pas facile à établir, le chat ne présentant pas forcément de symptômes apparents. C’est un examen clinique par le vétérinaire habituel, (mais qui n’a pas valeur de diagnostic de CMH) qui permet d’établir une suspicion de trouble cardiaque par la découverte d’une anomalie auscultatoire (exemple souffle). Attention toutefois, un souffle au cœur n’est pas pour autant synonyme de CMH et inversement une CMH peut s’accompagner d’une auscultation cardiaque parfaitement normale !
Après la découverte chez un chat adulte, d’un souffle cardiaque apparu soudainement, il est cependant vivement conseillé d’effectuer un dépistage par le biais d’une échocardiographie qui reste actuellement le meilleur examen diagnostic de CMH.
L’examen écho-Doppler cardiaque
Il s’agit d’un examen indolore qui consiste à appliquer sur le thorax du chat une sonde émettrice et réceptrice d’ultrasons. Le principe est le même que celui qui est utilisé pour visualiser les bébés dans le ventre de leur mère.
Cet examen permet la visualisation du muscle cardiaque (évaluation qualitative de son aspect, mesure précise de son épaisseur en systole et diastole, étude de sa cinétique). Il permet également de déterminer la taille des cavités et évaluer l’aspect des valves.
L’effet Doppler, permet de mesurer la vitesse du flux à travers les valves et estimer la pression qui règne dans les cavités cardiaques. On peut également contrôler l’étanchéité des valves.
Dans le cas de la CMH, cet examen va permettre de mettre en évidence l’épaississement très caractéristique du septum ou de la paroi du ventricule gauche ainsi que révéler la présence d’une obstruction sous-aortique.
Ci après, cliché d’échocardiographie de CMH féline : Coupe grand axe en mode 2D.
Ce cliché montre que le septum en région sous aortique (flèche rouge) est épaissi à l’origine d’une obstruction.
La paroi libre du ventricule gauche n’est pas épargnée. (Source : Cliché PR. V. Chetboul, Unité de Cardiologie d’Alfort)
Ci après, cliché de coupe transversale transventriculaire en mode 2D de CMH féline :
Le septum et la paroi libre sont hypertrophiés de façon symétrique.
(Source : Cliché PR. V. Chetboul, Unité de Cardiologie d’Alfort)
Le cliché ci-contre montre un exemple d’anomalies détectées en mode Doppler couleur (chat atteint de CMH obstructive) : la tâche en couleur en haut de l’image correspond aux turbulences du sang traversant la région sous-aortique rétrécie.
La deuxième, en dessous, correspond à la visualisation du sang refluant du ventricule gauche dans l’oreillette gauche (fuite mitrale).
(Source : Cliché PR. V. Chetboul, Unité de Cardiologie d’Alfort)
D’autres techniques ultrasonores se développent mais sont actuellement réservées à des structures de pointe, notamment de recherche (Unité de cardiologie de l’ENV Alfort).
Nous parlerons plus particulièrement de la technique de Doppler Tissulaire.
L’échographie Doppler Tissulaire (Doppler tissue imaging, DTI) :
Cette technique déjà appliquée en cardiologie humaine, présente l’intérêt de permettre de mesurer la vitesse de déplacement des parois myocardiques tout au long du cycle cardiaque et de détecter précocement toute anomalie du fonctionnement du myocarde (altérations myocardiques) qui pourrait alors induire ou confirmer un diagnostique de suspicion de CMH, même lorsque l’écho Doppler traditionnel ne montre pas encore de dysfonction évidente.
La supériorité du DTI par rapport à l’échocardiographie conventionnelle a été démontrée chez le chien dans un modèle canin de cardiomyopathie dilatée. Cette technique est à l’heure actuelle, testée à une échelle plus large en pathologie spontanée canine (myocardiopathie dilatée) et féline (cardiomyopathie hypertrophique), dans l’Unité de Cardiologie d’Alfort.
Dans ces deux affections, des résultats préliminaires semblent indiquer que la sensibilité diagnostique et pronostique du DTI est supérieure à celle de l’échocardiographie Doppler classique.
(Source : Cahier du Vétomecum – Compte-rendu de la conférence du Pr. Valérie Chetboul « L’imagerie cardiovasculaire du futur en médecine vétérinaire »)
Les traitements proposés dans le cadre de la C.M.H
S’il existe pour les humains, des options chirurgicales (Myotomie-myectomie septale, alcoolisation septale, pose de stimulateur cardiaque) dans le traitement pour la CMH, les traitements proposés pour améliorer le confort de vie des chats atteints sont, à l’heure actuelle, essentiellement médicamenteux :
C’est d’une façon générale le traitement de l’insuffisance cardiaque vasodilatateur, IECA, diurétique et si nécessaire, antiarythmique pour améliorer le confort de vie du chat; et en traitement de fond le traitement spécifique de la maladie musculaire. Les IECA en plus de leur action vasodilatatrice bénéfique dans l’insuffisance cardiaque, ont aussi des effets myocardiques intéressants : effet anti-hypertrophique, effet anti-remodelage, effet anti-ischémique.
Les antagonistes du calcium dits inhibiteurs calciques, comme le diltiazem, ont des effets bénéfiques lors de MCH : propriétés anti-arythmiques mais aussi effets ciblés sur le myocarde (amélioration du remplissage cardiaque, effet anti-hypertrophique direct, effet anti-ischémique, action favorable sur la relaxation myocardique).
Les anti-arythmiques stricto sensu sont des substances qui stabilisent / régulent l’activité électrique des cellules du muscle cardiaque. Ils sont en priorité administrés aux chats chez lesquels des troubles du rythme ont été constatés.
Pour certains d’entre eux, cependant rarement utilisés chez le chat (plus chez l’homme), quelques effets indésirables sont à déplorer, tels que des troubles digestifs, des troubles visuels, une hypersensibilité au soleil (attention aux sphynx qui s’exposent au soleil) et des allergies cutanées.
Tous ces effets indésirables sont toutefois réversibles mais un contrôle chez un vétérinaire ophtalmologue est recommandé si apparaît le moindre doute de problème affectant la vision du chat.
Les diurétiques sont des médicaments favorisants l’élimination d’eau par voie urinaire (augmentation de la diurèse). Ils ne sont indiqués que chez les chats insuffisants cardiaques (c’est à dire présentant un œdème pulmonaire, une ascite ou un épanchement pleural).
Les anticoagulants (aspirine surtout) sont des substances qui fluidifient le sang et limitent les risques de constitution de caillots. Ils sont fortement recommandés lorsque le chat souffre d’épisodes de fibrillation auriculaire ou lors de dilatation atriale jugée importante par l’échographiste).
N.B : Certains médicaments peuvent aggraver une forme obstructive. Il est donc important, si vous consultez un autre vétérinaire que votre praticien habituel, de l’informer de l’existence de la maladie de votre chat et de son traitement, afin d’éviter un effet secondaire.
De manière générale, il faut éviter d’administrer à votre chat, tout autre médicament que celui que votre vétérinaire aura prescrit, sans le consulter.
Copyright Sphynx Club
La péritonite infectieuse féline
Il s’agit sans doute de la maladie féline la plus méconnue et celle qui est le plus sujet aux psychoses. Cet article a pour objectif de rétablir quelques vérités.
C’est une maladie virale qui atteint surtout les jeunes chats (moins de 2 ans) vivant en collectivité. Différents organes peuvent être atteints : Thorax, abdomen, cerveau, yeux…
La PIF est une maladie très grave et mortelle.
Il convient pour commencer, d’établir une différence très distincte entre un chat qui est positif aux coronavirus (ce qui est très fréquent, on estime que 90 % de la population féline a été mise en contact au moins une fois avec des coronavirus), et un chat qui développe une PIF.
En aucun cas il ne faut raisonner en terme de chat positif coronavirus = chat malade de PIF ou chat qui va développer une PIF.
Il est également important de rayer de son vocabulaire les termes de « test PIF » ou de « positif PIF ». Un test est un « test coronavirus », un chat est « positif coronavirus ».
Une étude menée en Angleterre, au cours d’expositions félines, a révélé que 84 % des chats étaient positifs au coronavirus. On estime que la situation de la population féline française est la même.
Symptômes
La PIF peut présenter deux formes principales :
- La forme humide avec formation d’épanchements liquidiens: les cavités naturelles de l’organisme du chat se remplissent d’un liquide produit par ses propres cellules du système de défense immunitaire. Ce liquide qui peut remplir l’abdomen, le thorax, ou les deux organes, est une gêne dans leur fonctionnement
- Gêne respiratoire si le liquide est présent dans le thorax,
- Problèmes digestifs si le liquide se situe dans l’abdomen.
- La forme sèche qui peut atteindre n’importe quel organe (souvent plusieurs en même temps). Il y a alors défaillance des organes atteints. Pour le foie on notera par exemple une jaunisse, des troubles digestifs…
Les chats malades de PIF présentent très fréquemment une uvéite. Les yeux changent de couleur, prennent une teinte brun rouge.
La PIF se développe suite à la mutation d’un banal coronavirus entérique, présent chez la majorité des chats. On ignore par quel processus un coronavirus mute. On soupçonne une prédisposition génétique chez certains chats qui possèderaient un système immunitaire se défendant moins bien contre une infection par un coronavirus. Cela ajouté à un stress important peut favoriser la mutation d’un coronavirus bénin en coronavirus pathogène et déclencher une PIF. Cependant, le pourcentage de chats positifs coronavirus développant une PIF est très peu élevé (environ 5%)
Dans une revue de 1999, P.J. Rottier conclut sur l’importance d’un système immunitaire capable sinon d’empêcher complètement l’infection, du moins de la contenir au maximum. Compte tenu des connaissances actuelles, il semble préférable de ne pas sélectionner une forte réponse anticorps et de privilégier une bonne immunité cellulaire (leucocytes et macrophages). Le problème est qu’aucun test ne permet de contrôler ce paramètre pour l’instant, et qu’on ne peut donc que choisir d’écarter de la reproduction les étalons et les femelles dont plusieurs ascendants et descendants sont décédés de la PIF.
Cette approche, basée sur la sélection des lignées a ses avantages : elle permet de limiter considérablement la probabilité de PIF si un chaton est placé dans un environnement coronavirus-positif.
Une étude décrite par K. Hok rapporte le très haut taux de mortalité de chatons coronavirus-négatifs lorsqu’ils sont placés dans un environnement coronavirus-positif : 90 à 100% des chatons décédés dans les 2 mois suivant l’introduction des chatons dans l’environnement contaminé, à comparer avec le taux de seulement 5% de mortalité chez les porteurs de coronavirus.
Mais l’on constate aussi beaucoup de cas de chatons négatifs qui placés en environnement positif n’ont pas développé de PIF. Cela démontre qu’en l’état actuel de la recherche, les causes de déclenchement d’une PIF sont encore assez méconnus.
Pour l’instant, on a isolé des facteurs favorisant le déclenchement d’une PIF :
- La surpopulation qui favorise la multiplication des souches virales et leur mutation
- Le facteur génétique (certains chats sont plus exposés que d’autres à développer une PIF)
- Le stress biologique (maladies, chaleurs, gestation) – FIV et FELV (les chats positifs ont plus de risques que les autres de développer une PIF
Transmission
Contrairement à une idée reçue, la PIF n’est pas contagieuse. Un chat malade de PIF n’excrète plus de coronavirus. On ne peut donc pas parler de transmission de PIF, mais seulement de transmission de coronavirus.
Les selles sont la première source d’infection. Les chats se contaminent en partageant la même litière, en respirant des poussières de selles lorsqu’ils grattent. Un chat venant d’être infecté par un coronavirus, va excréter pendant quelques jours, le virus dans sa salive.
Un chat faiblement positif aux coronavirus n’est pas excréteur.
Une transmission « in utero » (de la mère au chaton) n’a jamais pu être mise en évidence.
Il n’y a pas de transmission possible de coronavirus par l’urine.
La contamination indirecte est difficile mais possible, si l’on transporte sur soi, sur ses semelles, des poussières de selles. De plus, un chat en début de contamination, excrète dans un laps de temps limité, les coronavirus par la salive. En exposition féline, un tel chat qui éternuerait, pourrait donc transmettre des coronavirus à ses voisins de cage. On comprend donc la difficulté en élevage, de maintenir un statut négatif dans sa chatterie…
Les chats les plus souvent atteints sont jeunes ou âgés et vivent en collectivité.
Détection des coronavirus
Il n’existe aucun vaccin disponible en France. Le vaccin existant à l’étranger n’est pas sans danger. Il existe plusieurs tests de dépistage pour détecter la présence de coronavirus, voici les plus connus :
- Le test ELISA : Il s’agit d’un test basé sur la détection d’anticorps anti-coronavirus. La détection se fait sur un échantillon sanguin. La réponse est du type oui / non. L’inconvénient d’un tel test est qu’il présente de très nombreux faux négatifs, mais également de nombreux faux positifs. Il n’est donc pas considéré comme fiable.
- Le titrage anticorps : Sous ce terme générique, on englobe toutes les techniques consistant à déterminer le taux d’anticorps anti-coronavirus présent dans l’échantillon sanguin. A la différence du test ELISA, une multitude de dilutions de l’échantillon sanguin sont testés, ce qui permet d’avoir une bonne idée du taux d’anticorps. Il est important de noter que le titrage obtenu est variable en fonction du laboratoire qui le pratique, ce test n’est donc pas très fiable non plus.
- Le test RT – PCR : Ce test est considéré comme le plus fiable pour détecter la charge virale. Les tests PCR détectent directement les coronavirus, ou plus exactement leur matériel génétique, l’ARN. La technique dite de RT-PCR quantitative permet de quantifier avec une excellente précision le nombre de particules virales dans l’échantillon.Il est capital de comprendre que ce test ne doit pas être pratiqué sur échantillon sanguin : les coronavirus ne passant pas systématiquement la barrière intestinale, un tel test présente trop de risques de faux négatifs. Par ailleurs, contrairement à une idée très répandue, ce n’est pas parce que le virus est retrouvé dans le sang que le chat développera automatiquement une PIF, et inversement… il n’y a pas de corrélation entre la présence des coronavirus dans le sang et le développement d’une PIF.
Le test idéal est pratiqué sur écouvillon rectal, mais il peut aussi se pratiquer sur un échantillon de selles. Il constitue une « photographie » du statut du chat (excréteur ou non excréteur) à l’instant où est prélevé l’échantillon. Pour établir avec certitude la négativité d’un chat, il convient d’obtenir 5 résultats négatifs à un mois d’intervalle chacun.
Le laboratoire SCANELIS de Toulouse propose un test ayant un seuil de détection très faible (100 copies). Le résultat est présenté en 6 classes :
- Négatif : aucun virus n’a été détecté
- Très faible : virus détecté, mais l’animal n’excrète pas
- Faible : virus détecté, mais l’animal n’excrète pas
- Moyen : Virus détecté, chat excréteur
- Fort : le chat est excréteur de coronavirus
- Très fort : le chat est excréteur de coronavirus
Il faut savoir cependant, qu’aucun test ne permet de dire qu’un chat développera ou pas une PIF. Un chat peut avoir un taux élevé de coronavirus et être en excellente santé, vivre 15 ans. Un chat peut également négativer en éliminant le virus en quelques mois. Il est important de ne pas céder à la psychose : Un test positif n’est pas synonyme de PIF !
Diagnostiquer une P.I.F.
Pour établir un diagnostic de PIF en présence de signes cliniques, on peut procéder à un test par électrophorèse des protéines. Ce test permet de doser la proportion des différentes globulines (anticorps, pour simplifier) dans le sang. Le rapport A/G (albumine/globuline ?) est l’un des paramètres à mesurer dans le cas d’une suspicion de PIF. Ce test doit être pratiqué lorsque le vétérinaire a mis en évidence plusieurs symptômes de la PIF (abdomen gonflé, abattement, changement de la couleur des yeux…).
Toutefois, ces symptômes peuvent être également ceux d’autres maladies, et ne suffisent pas à conclure à une PIF.
En effet, certaines maladies présentent des signes cliniques très semblables de ceux d’une PIF. Il s’agit des pathologies suivantes :
- Cholangio hépatique (très bon pronostic, mais des chats furent euthanasiés pour symptômes de PIF)
- Lymphome
- Péritonite sceptique
- Pyothorax
- Chyolothorax
Pour affiner le diagnostic, en cas de PIF humide, il faudra effectuer un prélèvement et une analyse en laboratoire, du liquide d’épanchement abdominal.
Mais le seul moyen 100 % fiable de conclure à une PIF, est d’effectuer une autopsie sur le chat décédé. Si l’on peut comprendre que les particuliers rechignent à s’imposer cette épreuve après le décès de leur chat, tout éleveur a le devoir d’y recourir.
On peut déplorer toutefois que certains vétérinaires aient tendance à diagnostiquer un peu hasardement une PIF, quand ils sont en présence de symptômes qu’ils ne parviennent pas à soigner. Attention, un vétérinaire qui sur la foi d’un seul test positif en sérologie conclurait à une PIF, se rendrait responsable d’une faute professionnelle.
Traitement
En cas de PIF avérée, quand un diagnostic poussé, et des examens adéquats, ont permis d’établir une forte suspicion de PIF, l’utilisation à forte dose de corticoïdes est pratiquée. On peut également recourir à des injections d’interféron.
Mais le traitement n’est seulement que palliatif. La PIF est en effet mortelle chez 100% des chats malades. Il existe cependant quelques espoirs de traitements futurs grâce à de nouveaux médicaments.
La prévention
Nous avons vu précédemment qu’il est difficile d’obtenir en élevage, un effectif négatif coronavirus. Toutefois, il est possible de limiter considérablement les risques de déclenchement d’une PIF.
Nous ne parlerons pas du vaccin, sujet à controverse et qui à fait l’objet d’études aux résultats contradictoires. On peut espérer un jour que le génie génétique mettra en place un vaccin réellement efficace.
Actuellement, des précautions simples peuvent éviter à une chatterie de faire face un jour à un cas de PIF dans son effectif.
Limiter l’effectif de ses chats
Plus une chatterie possède de chats vivants ensemble, plus on augmente les risques de mutation des souches de coronavirus.
Eviter les lignées sur lesquelles on a eu connaissance de plusieurs cas de PIF
En effet, le facteur génétique semble jouer un rôle déterminant dans les risques de développement d’une PIF.
Une litière au minimum pour deux chats
Multiplier les litières permet en effet de limiter la transmission des coronavirus d’un chat à l’autre. Il va de soit que ces litières doivent être correctement entretenues.
Bibliographie / sites Internet :
Feline Infectious Peritonitis, Susan Little, DVM, DABVP (Feline)
Peter J.M. Rottier. 1999. The molecular dynamics of feline coronaviruses. Veterinary Microbiology 69 : 117-125.
Merci à Myriam Gullaud, de la chatterie Nha Kyrielle, généticienne, pour les informations régulièrement transmises au cours de ses recherches personnelles et qui a aidé à la rédaction de cet article.
Mise à jour le 28 mai 2004 d’après les informations recueillies au cours de la conférence sur la PIF, qui s’est déroulée à l’Ecole Vétérinaire de Maison Alfort, en avril 2004.